Une rentrée « inédite », voilà comment le ministre de l’Éducation nationale a qualifié à plusieurs reprises la rentrée 2020. Dans une vidéo qu’il adresse aux directeurs·trices J.-M. Blanquer insiste sur le besoin d’éducation accru. Il entend par là rappeler le décrochage de nombreux collégiens et lycéens pendant le confinement et au moment de la reprise. En effet, on estime qu’entre 5 et 25% des élèves ont perdu le contact avec l’école, avec une forte prévalence dans les cités éducatives.
Alors que le contexte sanitaire demeure tendu en cette fin de période estivale, le ministère tente par tous les moyens de garantir une rentrée pour tous au 1er septembre.
Le protocole sanitaire applicable à la rentrée 2020
La fin de la distanciation physique dans les établissements scolaires
Durant tout l’été, enseignants et syndicats ont guetté des mesures, des circulaires, des annonces émanant du ministère de l’Éducation nationale. Hormis le protocole sanitaire paru au mois de juillet, les autorités ont fait preuve d’attentisme. L’incertitude de l’évolution épidémique a visiblement dissuadé les responsables de prendre des décisions trop tôt. En fait, le principe général, qui a prévalu tout l’été et jusqu’à l’allocution du 26/08 de M. Blanquer, est l’accueil de tous les élèves à la rentrée 2020.
Or, la seule possibilité pour permettre à tous les jeunes de retourner à l’école, c’est d’alléger les mesures préventives. En effet, le protocole en vigueur à la réouverture des établissements en juin limitait le nombre d’élèves en présentiel.
C’est pourquoi, il a été décidé rapidement de lever la condition de la distanciation physique. Dès lors que le port du masque concerne tous les élèves de 11 ans et plus, ainsi que tout le personnel éducatif, il semblerait que le risque de propagation du virus soit contenu. Mais parents et enseignants s’interrogent sur la validité de cette mesure. Tandis que les marquages au sol occupent toujours nos espaces quotidiens, devant la boulangerie, la Poste, les agences bancaires, comment passer outre à l’école ? De plus, les enseignants et familles à risque se demandent s’ils seront vraiment bien protégés dans les espaces clos. De fait, les médias et les autorités ont tellement glosé sur le degré de contagiosité de ce coronavirus que certain·e·s ont du mal à croire qu’un simple masque les protègera.
Les mesures sanitaires applicables à la rentrée 2020
Depuis le mois de juillet, le protocole sanitaire n’a guère évolué et comprend :
- gestes barrière,
- lavage des mains,
- ventilation des classes,
- port du masque obligatoire à partir de 11 ans (collèges et lycées) et pour tous les adultes, même pour les enseignants de maternelle.
Au vu du contexte incertain et de la menace d’un rebond épidémique, J.-M. Blanquer a toutefois apporté quelques précisions lors de son allocution du 26 août.
Si un élève ou un personnel a les symptômes, il y a immédiatement test et s’il est positif, la procédure, qui est de la responsabilité de l’ARS, se déclenche. Cela peut aller jusqu’à la fermeture d’une classe, d’une école ou de plusieurs écoles dans un délai de 48 heures.
Jean-Marie Blanquer, Ministre de l’Education nationale, allocution du 26/08/20
La polémique autour des masques
Concernant le port du masque, le gouvernement a soulevé la polémique en indiquant ne pas devoir fournir de masques aux élèves, sauf aux plus démunis. En effet, l’État considère qu’il est de la responsabilité des familles d’équiper leurs enfants de masques pour la reprise des cours. Cependant, certaines régions, comme l’Ile-de-France et l’Occitanie, ont décidé de doter chaque lycéen de deux masques lavables.
Ainsi, Carole Delga, présidente de la région Occitanie, a déclaré sur son compte Twitter que « ce n’est pas aux familles d’en subir la charge financière. » De même, le département de la Seine-Saint-Denis a décidé de donner des masques à tous ses collégiens.
En effet, d’après Le Parisien, « le budget pour une famille de quatre personnes avec deux enfants de plus de 11 ans s’élève à 96 euros par mois pour des modèles lavables et à 228 euros pour des masques à usage unique ». Une charge importante pour les familles.
Par ailleurs, certaines régions ont prévu de distribuer des ordinateurs. Par exemple, l’Ile-de-France dotera tous les élèves de Seconde, soit 100 000 ordinateurs à distribuer à la rentrée. La région espère ainsi contribuer à lutter contre la fracture numérique. Par extension, l’idée est aussi d’anticiper un éventuel reconfinement en veillant à équiper les lycéens. L’an passé, 200 000 élèves avaient bénéficié d’un ordinateur ou d’une tablette en région IdF.
Présentiel ou numérique ? le dilemme de la rentrée 2020
L’impératif de continuité pédagogique
D’autre part, toute la difficulté du ministère tient dans l’attente des directives de l’ARS. D’un côté, il faut assurer au maximum les cours en présentiel. De l’autre, il faut se plier aux exigences sanitaires avec des prévisions à très court terme. De quoi inquiéter enseignants et parents sur la poursuite des enseignements après quelques semaines de reprise. J.-M. Blanquer a tenté de rassuré les familles en précisant qu’en cas de fermeture des écoles, il y aurait continuité pédagogique. Mais le tout numérique a fait long feu et de nombreux spécialistes ont pointé les défaillances d’un enseignement exclusivement à distance. De nombreux pédiatres s’étaient alarmés des répercussions psychologiques sur l’isolement social des jeunes, sur le déficit d’interactions réelles. De plus, certain·e·s ados ont pu glisser vers le syndrome de la cabane et perdre intérêt et curiosité pour le monde du dehors.
Cette tendance est d’autant plus alarmante pour les jeunes qui doivent prendre en main leur avenir. En particulier pour ceux confrontés aux choix d’orientation. Alors qu’ils gagneraient à multiplier les rencontres, les expériences, à observer au maximum le monde qui les entoure, ils risquent de s’enfermer et de se fermer de nombreuses portes. On ne peut bien sûr prédire de rien et l’humain est plein de ressource et se distingue par son adaptabilité constante. Mais restreindre ses champs d’observation n’augure rien de positif pour l’acquisition des compétences psycho-sociales. Ainsi, de l’observation découle le raisonnement, l’esprit critique, l’empathie, la capacité d’analyse… Autant de compétences comportementales utiles pour améliorer la connaissance de soi. Pour trouver sa place dans la société et explorer ses aptitudes.
Si à ce contexte on ajoute le décrochage scolaire, on comprend mieux pourquoi le ministère tient tant à maintenir les cours en présentiel. L’avenir des jeunes est en jeu et d’une situation inédite il pourrait découler des répercussions lourdes au fil des mois. Pourtant, les rumeurs n’ont eu de cesse d’annoncer une reprise partielle avec des cours en ligne et en présentiel. Cependant, ce type de dispositif réclame bien plus que de renvoyer vers les sites du CNED ou de Lumni.
La rentrée 2020 sous le signe d’un accompagnement éducatif de qualité
Car les élèves appartiennent à un groupe classe et ont besoin d’un suivi individualisé. Avec l’expérience du premier confinement, on sait maintenant que scolariser les élèves à leur domicile n’est pas la panacée.
En fait, la position de l’Éducation nationale s’avère cornélienne. D’une part, elle affirme la nécessité du présentiel pour lutter contre le décrochage scolaire. D’autre part, elle veut garantir la continuité pédagogique grâce au numérique en cas d’impératif sanitaire. Finalement, ce coronavirus met les politiques face à une gestion des risques : risque sanitaire contre risque de déficit éducatif.
Pour le moment, nous marchons sur la crête en forçant les précautions sanitaires dans l’espoir d’éviter un reconfinement. Que pouvons-nous faire de mieux face à tant d’incertitude ? Si ce n’est réaffirmer la nécessité de l’école pour tous et soutenir les enseignants pour la rentrée 2020.
Le rôle des enseignants renforcé en cette rentrée 2020
Dans une tribune pour Marianne, Natacha Polony titre » Professeurs, pour nous tous, retrouvez votre fierté ! « . Un cri du coeur, émouvant, fort, qui se veut un soutien sans faille à l’école de la République et à ses enseignants.
(…) Nous avons plus que jamais besoin d’une école fondée sur l’exercice de la raison. Et c’est une urgence plus ardente que la quête d’un risque zéro sanitaire. Professeurs, nous avons besoin que vous retrouviez cette fierté d’œuvrer pour la nation, et en particulier pour ses enfants les plus fragiles.
Natacha Polony, « Professeurs, pour nous tous, retrouvez votre fierté ! » Marianne, tribune du 27/08/2020
De fait, les enseignants ont eu tout l’été pour digérer le confinement et la reprise chaotique des cours courant juin. Ils sont arrivés à la conclusion que, plus que jamais, leur mission dépassait celle d’une simple transmission de savoirs. Dans de nombreux établissements, les questions de rentrée se concentrent sur la qualité de l’accueil des jeunes. Mais aussi sur la prise en compte de leur état psychologique. Déjà le travail à distance avait permis de créer des liens inédits entre profs et élèves. Découvrir un pan de l’intimité de chacun·e derrière son écran a permis à certains de réinventer des liens jusqu’ici distendus, voire inexistants.
De même, les élèves ont expérimenté le travail à distance et ont conclu qu’ils apprenaient bien mieux avec l’aide de leur enseignant. Étonnamment, cette situation difficile a fait émerger des interactions fructueuses entre élèves et profs. Cette rentrée 2020 constitue une belle occasion de renforcer le lien école/famille pour oeuvrer tous ensemble pour la réussite du plus grand nombre. Avec l’aide des associations, des municipalités, des équipes éducatives et aussi de Weeprep qui accompagne les jeunes dans leur orientation scolaire !
Bonne rentrée à toutes et tous !