Lorsque l’on parle de coopération chez l’adolescent on sollicite généralement l’éducation positive. Souvent, il s’agit de trouver les moyens de faire participer les jeunes au quotidien de la famille. Mettre la table, ranger ses vêtements, descendre les poubelles… D’autre part, du point de vue scolaire, la coopération concerne le travail de groupe et la mise en oeuvre de projets communs. Mais dans quelle mesure coopérer peut-il aider les jeunes dans leur orientation professionnelle ?
La coopération dans les soft skills
Coopérer pour s’améliorer
La coopération fait partie des compétences douces qui se développent grâce aux multiples interactions et expériences sociales. Accepter de l’aide, soutenir un proche ou un camarade, partager ses savoir-faire et être renforcent l’estime de soi et développent les capacités d’amélioration (kaizen). Quelles compétences rentrent en jeu dans la coopération ?
Voici quatre points incontournables :
- exprimer son point de vue,
- analyser les idées des autres,
- revoir son propre jugement,
- adapter et modifier ses propositions au sein du groupe.
Ainsi, les jeunes mis en situation de coopérer adoptent une double attitude : auto-réflexive et de décentrage pour comprendre les autres. Appréhender le monde qui nous entoure passe avant tout par l’expérimentation des permanences (ressemblances) et divergences (différences) des idées et comportements des autres. Ce panel d’expériences enrichit la perception des ados. Ceux-ci peuvent alors sortir de leur coquille pour explorer davantage le monde et y trouver leur place singulière. Bien sûr, ce processus prend du temps. Il se poursuit tout au long de la vie, par essais et ajustements successifs. De plus, il repose sur les validations et invalidations dans le groupe. On n’arrête jamais d’apprendre, de soi et des autres ! En fait, la coopération améliore la connaissance de soi et des mécanismes en jeu dans les relations sociales.
La coopération dans le monde du travail
Par ailleurs, la compétence de coopération sur le marché du travail est une réalité. Sur le site ministériel du CEDIP, on trouve plusieurs articles consacrés à la coopération dans le management d’entreprise. Parmi les points abordés, celui explicitant les conditions requises offre de bonnes pistes de réflexion :
- « mettre en place une bonne communication,
- être accepté et reconnu par l’autre,
- respecter le secret,
- promouvoir l’égalité et la liberté des acteurs ainsi que la justice dans la coopération. »
Selon le CEDIP, le recours à la coopération en entreprise constitue un moyen efficace de partage des compétences pour atteindre des objectifs. Elle n’est pas automatique et se trouve souvent confrontée à la compétition interne. C’est pourquoi les chances de réussite dépendent des facteurs mentionnés plus haut. En cas de non respect de ces quatre points, les relations entre les individus risquent de basculer dans la compétition. Et elles peuvent déclencher un cortège d’attitudes négatives : domination/soumission, dénigrement/surestime, confusion émotionnelle, non respect des règles de confidentialité…
Parents et professeurs ont tout intérêt à prêter attention à ces règles s’ils veulent aider les jeunes dans leurs prises de décision. Il s’agit de fonder un véritable et sincère partenariat entre adolescents et éducateurs. Nous ne saurions instaurer une bonne communication avec nos enfants sans respecter leur intimité, reconnaître leur singularité et les considérer comme nos égaux. Il en va de la liberté de chacun et chacune !
Coopérer au sein de sa famille : prendre sa place dans un groupe
Assurer ses besoins élémentaires
En fait, de nombreux articles sur le net sont dédiés à la coopération dans la famille. En particulier pour impliquer les ados dans des petits travaux utiles au quotidien. Il s’agit de responsabiliser les jeunes et de les habituer à assumer des tâches parfois ingrates, mais inévitables. L’idée est de les amener graduellement à prendre en charge toutes les actions relatives à leurs besoins élémentaires. Se préparer à manger, ranger et organiser ses affaires personnelles, prendre soin de soi (hygiène, sommeil, alimentation). Enfin, on attend des jeunes qu’ils participent aussi aux corvées ménagères : vider la poubelle, faire la vaisselle, s’occuper des animaux etc. Ainsi, en les engageant dans ces tâches on leur montre qu’ils sont nos égaux en droit et en devoir. Chacun accomplissant sa part en fonction de son âge et de ses habilités.
Participer au bien-être de la famille
Au sein d’une famille, nous sommes égaux face à des nécessités qui bénéficient à tous. Dans une maison propre et rangée, nous évoluons dans un environnement agréable. De même, penser à sortir le chien évite les mauvaises surprises au pied du canapé ! En fait, en participant activement à la vie de la famille, les jeunes gagnent en égalité et en liberté vis-à-vis de leurs parents. En effet, ces derniers verront dans la coopération de leurs ados une marque de maturité et d’autonomie. Ils seront alors plus à même d’instaurer un dialogue d’adulte à adulte. En réduisant leur degré de dépendance domestique, les jeunes accèdent à une reconnaissance libératrice. Et surtout, ils peuvent prétendre à un niveau d’interaction plus complexe avec leurs parents.
Voilà une condition importante de l’écoute et de l’accompagnement des jeunes dans leurs choix d’orientation. Développer la coopération au sein de la famille sert de modèle mental exportable dans d’autres domaines d’action. Comme la recherche de son projet de vie, de son ikigai.
De même, c’est en s’appuyant sur les réactions de leur entourage (feed back) que les jeunes peuvent améliorer leur Sentiment d’Efficacité Personnelle. Ainsi, en coopérant efficacement au sein de leur famille, les ados seront d’autant plus confiants dans leurs capacités de réussite en dehors du cercle familial.
Coopérer au collège et au lycée : favoriser la relation élève/enseignant
Coopérer facilite les apprentissages
Souvent présentées comme un avant-goût du monde du travail, les activités de groupe au collège et au lycée cherchent à développer l’esprit coopératif. Dès l’école primaire, des jeux coopératifs invitent à utiliser l’intelligence collective pour résoudre des problème (en EPS, en maths etc.). L’idée est de reconnaître à chacun le droit de participer en apportant ses talents propres. Ainsi pour un exposé, un tel écrira l’affiche de sa plus belle plume, tandis qu’une autre prendra la parole pour présenter de façon audible les fruits d’un travail collectif. Le fait de partager les erreurs comme les réussites permet aussi aux plus timides de prendre davantage part à un projet. Cependant, les expériences les plus concluantes se trouvent souvent dans des exercices « réellement » collectifs, comme la chorale ou le théâtre.
Dans ces cas-là, la coopération permet d’aborder les apprentissages sous un angle plus ludique et actif. Cet aspect est fondamental car le jeu s’avère extrêmement formateur. A titre d’exemple, un ancien collègue travaillant en ZEP avait fait jouer, chanter et danser ses élèves de CM2 dans une comédie musicale historique. Une formidable expérience plébiscitée par les parents et les enfants ! Grâce au jeu et à la coopération induite, les élèves ont pu acquérir ET consolider des apprentissages humains et didactiques. Une vraie réussite reconduite chaque année et toujours copieusement applaudie par les familles.
La coopération renforce la cohésion du groupe et la confiance en soi
De même, une amie professeure d’anglais en lycée et BTS a pu relever tous les bénéfices d’une chorale en classe de Terminale. En effet, les retombées sont très positives pour la maîtrise de la langue, mais aussi pour l’acquisition des compétences douces. Si, au départ les élèves ont montré du scepticisme, ils ont par la suite totalement adhéré au projet de leur enseignante. Ils ont compris qu’ils gagnaient à coopérer, à s’appuyer les uns sur les autres et permettre à chacun·e de participer à sa mesure. Les relations entre élèves se sont améliorées et le niveau global de confiance en soi a grandi !
Finalement, ce qu’il faut retenir de ces expériences c’est l’intérêt double de la coopération : un apprentissage social et didactique. Mais aussi une amélioration des relations élève/enseignant. En organisant des situations dans lesquelles les jeunes peuvent s’affirmer, être dans l’action et en interaction avec les autres, les enseignants gagnent la confiance de leurs élèves. C’est l’occasion de s’entrevoir différemment et de nouer des liens de respect réciproque. En particulier, les professeurs principaux qui ont la charge d’accompagner les élèves de 3ème et de Terminale dans leur orientation scolaire ont besoin d’activités pédagogiques spécifiques pour mieux connaître leurs élèves. Ainsi, l’outil Weeprep leur donne un accès individualisé pour suivre chaque élève. Cela permet d’établir une relation de confiance propice à une meilleure écoute des besoins et attentes des jeunes en terme d’orientation professionnelle.
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Coopérer entre pairs : utiliser son réseau d’amitiés et choisir ses alliances
Nos amis comme autant d’aspects de nous-même
A un niveau plus personnel, les adolescents constituent leur propre réseau d’amis susceptibles de les aider dans leur quête de soi. Agissant comme autant de miroirs d’eux-mêmes, leur cercle d’amis coïncide avec les différents aspects de leur propre personnalité. Cependant, selon les conseils de la méthode ikigai, nous avons intérêt à choisir au mieux nos relations afin d’éviter d’y inclure des influences négatives. Ce qui ne signifie pas pour autant que ce cercle d’amis doive être homogène.
Bien au contraire ! Nous avons tous nourri des amitiés avec des tempéraments impulsifs, des timides, des éloquents et des modestes… A bien y réfléchir, cet ensemble nous permet d’expérimenter à travers les autres des parts de nous-mêmes plus ou moins dominantes. Et en fonction des situations auxquelles nous sommes confrontés, nous allons nous appuyer sur tel·le ou tel·le ami·e pour nous conforter dans nos décisions. Vous remarquerez que si nous hésitons à passer à l’action nous demandons conseil à un prudent ou, au contraire, à un optimiste. En fait, notre choix reflète déjà nos doutes ou nos intentions.
La comparaison entre pairs comme facteur d’ajustement des motivations
Ainsi, le cercle de nos relations occupe une place moteur dans nos décisions. Non pas parce qu’il détermine entièrement nos choix mais parce qu’il nous permet de les confronter. En cela, la coopération entre pairs offre un arbitrage intéressant.
Par ailleurs, l’entraide et l’écoute, fondamentales dans une démarche coopérative, facilite la prise de décision. Si j’ai quelques amis intéressés par le design, le dessin, les arts décoratifs, je serai davantage stimulé pour chercher des informations sur les métiers et les études liés à ce domaine. En se comparant à des amis proches, les adolescents évaluent leur degré d’implication dans un domaine de prédilection. De plus, ils peuvent en découvrir d’autres auxquels ils n’avaient pas songé. Ou tout simplement enrichir leur approche d’un secteur professionnel. Dans tous les cas, le réseau amical ouvre de nouvelles perspectives et génère à nouveau une réflexion sur soi et ses projets.
Et n’oublions pas que la coopération dépasse la simple collaboration. Elle mobilise les compétences et qualités de chacun et chacune au service d’un projet commun. Nous, parents, enseignants, amis, sommes partis prenantes du projet de nos ados. Nous faisons partie de leur histoire et ils peuvent compter sur notre regard bienveillant et nos compétences pour les soutenir dans leurs projets d’avenir.